Visites médicales du permis de conduire

EAD comme Ethylotest Anti-Démarrage : risque de double peine !

La rédaction du blog a demandé à un avocat,  de donner son avis sur le dispositif d’éthylotest antidémarrage thème sur lequel nous avions déjà publié un article sur notre blog. Maître Etienne Lejeune aborde cette question de l’EAD d’un point de vue juridique et sur les subtilités que tout conducteur devrait connaître, notamment sur le risque de double peine.

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C’est quoi l’EAD ?

En de contrôle positif à l’alcool avec un taux délictuel (au-delà de 0,40mg/l d’air expiré) vous risquez de voir votre permis de conduire suspendu plusieurs mois par le préfet dans l’attente de votre procès.
Cette suspension est le plus souvent d’une durée de 6 mois pendant lesquels vous avez interdiction de conduire.
Evidemment, cela peut avoir de lourdes conséquences pour votre vie personnelle mais aussi, et surtout, pour votre vie professionnelle.
Une alternative est désormais possible :
l’installation d’un EAD (éthylotest anti-démarrage) dans votre véhicule (article R.224-6 du code de la route).
L’éthylotest anti-démarrage permet de calculer le taux d’alcool du conducteur. Si ce taux est supérieur à la limite autorisée, le véhicule ne démarre pas.
A la fin de la période fixée par le préfet et qui ne peut excéder 12 mois, vous devez vous soumettre à une visite médicale. ( Le délai de 6 mois a été porté à 12 mois par le décret du 18 mai 2020 qui a modifié l’article R.224-6 du code de la route).
Initialement testé dans quelques départements, le dispositif est désormais étendu à l’ensemble du territoire.

A savoir : l’EAD ne concerne que les infractions liées à l’alcool, mais pas celles relatives aux stupéfiants. Et ne sont concernés que les conducteurs dont le taux d’alcool est inférieur à 0.90mg/l d’air expiré (1.80g par litre de sang) et qui ne sont pas récidivistes.
Consultez le site internet de votre préfecture pour connaître les critères précis d’attribution.
L’EAD peut aussi être ordonné par un juge à titre de peine.

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Comment ça fonctionne ?

L’EAD est relié au moteur du véhicule.
Pour démarrer, le conducteur doit souffler une première fois. Le moteur ne démarre que si le
taux est inférieur à 0.1mg/l d’air expiré (article R.234-1 du code de la route).
Entre 5 minutes et 30 minutes après le démarrage du moteur, le conducteur doit souffler une
seconde fois.
S’il ne souffle pas dans le délai imparti, le système bloque le démarrage au bout de 10 secondes à l’arrêt.

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Combien ça coûte ?

Si l’EAD vous permet d’éviter une suspension de permis, des coûts sont néanmoins à prévoir !
A l’achat le dispositif vaut environ 1 500€ et à la location environ 100€/mois.
Prévoyez des coûts supplémentaires pour le montage et le démontage du dispositif par un professionnel agréé (liste en préfecture) ainsi que pour le passage devant la commission médicale.

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Qui décide de l’EAD ?

En cas de contrôle positif à l’alcool, vous pouvez demander aux forces de l’ordre de noter sur l’avis de rétention du permis que vous souhaitez un EAD. Cet avis sera ensuite transmis au préfet qui pourra vous proposer ce dispositif comme alternative à la suspension administrative de votre permis.
La décision du préfet vaudra permis de conduire.
Si le préfet prend un arrêté de suspension de votre permis, vous pouvez intenter un recours administratif directement auprès de lui, pour demander la mise en place d’un EAD, en justifiant par exemple de ce que vous avez un besoin impératif de pouvoir conduire pour votre travail.
A savoir : si le préfet vous propose d’office d’un EAD mais que vous n’en voulez pas (notamment pour des raisons financières) vous pouvez tout à fait le refuser. Dans ce cas, le préfet prendra une décision de suspension « classique ».

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Quelles sanctions si vous ne respectez pas la mesure EAD?

Si vous ne respectez pas la décision du préfet (en roulant sans EAD, ou bien en le détériorant ou en faisant souffler quelqu’un d’autre), vous encourez les sanctions suivantes en cas de contrôle (article R.224-6 du code de la route) :

Et si, en plus du non-respect de la mesure EAD, votre taux d’alcool excède le taux légal, ou que vous avez commis une autre infraction, vous vous exposez aux sanctions de ladite infraction !

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Si l’EAD a été ordonné par un juge les sanctions sont les suivantes

1. En cas de non-respect de l’interdiction de conduire un véhicule qui ne soit pas équipé d’un EAD (article L.234-16 du code de la route) :

2. En cas de conduite d’un véhicule équipé d’un EAD mais après l’avoir détérioré ou après avoir fait souffler quelqu’un d’autre :

Attention à la « double peine »

Le dispositif EAD est assez récent et certaines juridictions s’y perdent, avec un risque de double peine à la clé. Notamment lors des procédures d’ordonnance pénale.

Explications.
Parallèlement à la décision du préfet décidant de mettre en place un EAD, le procureur de la  République vous poursuit au pénal par exemple selon la procédure de l’ordonnance pénale.

L’ordonnance pénale vous sera notifiée par le Procureur ou le plus souvent un Délégué du Procureur, mais sans audience et donc sans recueillir vos observations éventuelles.

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Si vous acceptez l’ordonnance

(qui très souvent vous condamne à une peine de suspension de permis de conduire sans EAD), cette suspension commencera alors le jour même et non comme auparavant, à compter du jour des faits.
Exemple : le 1 er janvier vous êtes contrôlé par les forces de l’ordre avec un taux de 0.7mg/l d’alcool dans l’air expiré. Le préfet vous propose la mise en place d’un EAD pour 4 mois.

Puis le 1er mars, le Délégué du Procureur vous notifie une ordonnance pénale avec une suspension de 4 mois.

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Si vous acceptez l’ordonnance, vous subirez donc :

Total : 6 mois !

Si l’ordonnance vous est notifiée après la fin de la période d’EAD, vous subirez :

Total : 8 mois !

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C’est clairement une double peine puisqu’auparavant la suspension administrative s’imputait sur la suspension judiciaire. Malheureusement, le législateur considère qu’il s’agit de peines de natures différentes et donc qu’il n’est pas possible d’imputer la suspension administrative EAD sur la suspension judiciaire sans EAD…

Dans un tel cas de figure il est vivement conseillé de contester l’ordonnance pénale en faisant opposition et de plaider son dossier devant le tribunal correctionnel pour échapper à la double peine !

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